ÉDITORIAL : TECHNOLOGIE ET AFRICANITÉ – UNE FUSION NÉCESSAIRE POUR L’AVENIR DE LA RDC

Par Patrice Piardon, CEO de IKODI IT & DESIGN SOLUTIONS

La République Démocratique du Congo, dotée d’un potentiel économique et technologique considérable, ne peut plus se permettre d’être un acteur périphérique dans la révolution numérique mondiale.

L’émergence d’une économie digitale compétitive passe inévitablement par une industrialisation intelligente, une souveraineté numérique affirmée et une formation massive des talents locaux. L’intégration de solutions technologiques adaptées à notre contexte socio-économique est aujourd’hui un impératif stratégique, non seulement pour rattraper notre retard, mais surtout pour anticiper les mutations de demain.

Technologies et identité africaine : une convergence stratégique

L’idée selon laquelle l’Afrique serait en marge du progrès technologique est dépassée. Pourtant, alors que l’Europe et l’Asie perfectionnent déjà l’intégration de l’intelligence artificielle dans la gouvernance et la gestion des villes, l’Afrique en est encore à ses premières expériences.

Prenons l’exemple de Singapour : en 2019, ce petit pays a lancé des robots patrouilleurs autonomes pour surveiller les espaces publics. Pendant ce temps, à Kinshasa, des robots régulateurs de trafic conçus par des ingénieurs congolais étaient déjà en service, mais sans financement à grande échelle pour une généralisation. Une initiative locale sous-exploitée face à une approche asiatique systématisée et soutenue.

L’Afrique, riche en solutions adaptées à ses réalités, doit mieux structurer son approche. La culture africaine a toujours été un terreau fertile d’innovation. À l’image du Japon, qui fusionne robotique et artisanat traditionnel, ou de l’Inde, qui marie intelligence artificielle et pratiques agricoles, la RDC doit concevoir son propre modèle technologique en capitalisant sur son ingéniosité locale.

Transformation numérique et emploi en RDC

En une décennie, l’Europe et l’Amérique du Nord ont massivement investi dans l’automatisation du travail, avec l’essor de l’intelligence artificielle appliquée à la gestion d’entreprise et à la finance. Amazon, par exemple, a remplacé des milliers d’emplois en entrepôt par des robots, tandis que la Chine a développé des usines automatisées capables de fonctionner 24h/24 avec un minimum d’intervention humaine.

En Afrique, l’impact de la transformation numérique est encore limité par le faible accès à Internet et la méfiance face à l’automatisation. Pourtant, les opportunités sont immenses. La fintech kenyane M-Pesa a révolutionné l’économie mobile en Afrique de l’Est, montrant qu’avec une approche adaptée, les nouvelles technologies peuvent générer de l’emploi plutôt que d’en détruire.

Le Congo doit adopter une vision proactive : former massivement des ingénieurs en logiciels, des spécialistes en cybersécurité et des analystes de données. La RDC peut devenir un hub numérique si elle investit dans des bootcamps de formation intensifs, à l’image de la France qui a structuré son écosystème de startups en soutenant des initiatives comme "Station F", le plus grand incubateur du monde.

Industrialisation et souveraineté technologique

L’Asie a démontré que la possession de matières premières n’a de valeur que si elle s’accompagne d’une capacité de transformation locale. La Corée du Sud, qui importait autrefois sa technologie, est devenue un leader mondial dans la fabrication de semi-conducteurs grâce à une politique industrielle ambitieuse.

En comparaison, la RDC, pourtant premier producteur mondial de cobalt – un métal stratégique pour les batteries –, reste absente de la chaîne de valeur. Le Rwanda, avec son ambition de devenir un centre d’innovation, a récemment inauguré la première usine de fabrication de smartphones en Afrique, tandis que la RDC continue d’exporter des matières premières brutes.

Le pays doit impérativement créer des unités de transformation locales et investir dans la recherche appliquée. La construction de data centers nationaux et d’infrastructures cloud souveraines doit également être une priorité, à l’image du Nigeria qui a lancé son propre hub numérique pour sécuriser ses données stratégiques.

Géopolitique et stratégies numériques : la RDC à la croisée des chemins

Sur le plan technologique, l’Afrique est encore perçue comme un marché de consommation plutôt qu’un acteur clé. Tandis que les États-Unis et la Chine se livrent une guerre d’influence sur l’intelligence artificielle, les infrastructures de télécommunications africaines restent majoritairement contrôlées par des entreprises étrangères.

En 2021, l’Union Européenne a mis en place un cadre strict pour protéger ses données contre l’ingérence des géants américains du numérique. Pendant ce temps, la majorité des pays africains, y compris la RDC, ne disposent pas encore de lois robustes sur la cybersécurité.

La RDC doit exiger des accords qui imposent le transfert de technologie et la création de centres de formation locaux. Il est impératif d’investir dans l’expansion de la fibre optique et du réseau 5G pour réduire la fracture numérique et stimuler l’économie digitale.

Un avenir technologique pour la jeunesse congolaise

Alors que l’Estonie enseigne le code informatique dès le primaire et que la Chine mise sur l’intelligence artificielle pour repenser son éducation, l’Afrique accuse un retard considérable dans la formation de sa jeunesse aux métiers du numérique.

Cependant, l’histoire prouve qu’un pays peut rattraper son retard technologique en une génération. La Finlande, dans les années 1990, était absente du marché des nouvelles technologies. En 2023, elle est devenue un leader mondial de l’intelligence artificielle. Ce changement a été possible grâce à une refonte de son système éducatif et à une politique d’innovation soutenue.

La RDC doit s’en inspirer en intégrant massivement les nouvelles technologies dans ses programmes scolaires. Un enfant congolais doit pouvoir maîtriser les bases du développement web et de la programmation dès le plus jeune âge, non seulement pour être compétitif sur le marché du travail, mais aussi pour contribuer à la transformation numérique de son pays.

Conclusion

L’essor technologique de la RDC ne relève pas de l’utopie, mais d’une nécessité impérieuse. Les dix dernières années ont montré que les nations qui investissent dans la technologie accélèrent leur développement, tandis que celles qui restent passives deviennent dépendantes.

Il est temps que l’Afrique ne se contente plus d’être une consommatrice passive de solutions numériques, mais devienne une force de proposition sur la scène internationale. Avec ses ressources et son potentiel humain, la RDC peut devenir un acteur clé du numérique mondial.

L’histoire nous observe. Nous devons agir maintenant pour construire un avenir technologique souverain et prospère.

Patrice Piardon
CEO de IKODI IT & DESIGN SOLUTIONS

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